Les symptômes de détresses psychologiques touchent la plupart des personnes vivant avec un handicap. En effet, les études démontrent que l’activité physique et surtout le sport de compétition semblent avoir des effets positifs sur les capacités psychosociales des personnes handicapées. Par exemple, plusieurs ressentent une augmentation de l’estime de soi, du bien-être et de la qualité de vie, tout en diminuant l’anxiété et la dépression. Par contre, la plupart des études se basent uniquement sur des athlètes qui sont en mesure d’effectuer la plupart des tâches quotidiennes de manière autonome, comme les athlètes ayant une paraplégie ou une amputation des membres inférieurs.
En revanche, les personnes vivant avec un handicap plus sévère subissent des difficultés spécifiques telles que le transport et la dépendance d’autrui pour la pratique du sport et les tâches quotidiennes. Jusqu’à présent, très peu d’études ont identifié les sports ou les autres interventions susceptibles d’améliorer le fonctionnement psychosocial des adultes ayant un handicap physique sévère.
L’une des activités sportives de compétition les plus populaires pour les athlètes ayant un handicap sévère est le boccia. Le boccia peut être pratiqué par des athlètes ayant des troubles neuromusculaires qui affectent gravement le système moteur, comme la dystrophie musculaire, l’ataxie de Friedrich et la sclérose en plaques.
Barak et ses collaborateurs ont voulu étudier les effets psychosociaux d’un programme compétitif de boccia chez les personnes ayant une incapacité chronique sévère. Lors de cette étude, les auteurs ont séparé les participants en 4 groupes ; deux groupes de boccia compétitifs, un groupe de boccia récréatif et un groupe contrôle. Parmi les deux groupes de boccia compétitifs, un groupe était indépendant (n = 9), c’est-à-dire, qu’ils ont joué au Boccia sans l’aide d’un assistant et l’autre groupe était non indépendant (n = 7), c’est-à-dire qu’ils ont joué au Boccia avec l’aide d’un assistant. Les participants du groupe récréatif (n = 14) ne jouaient pas régulièrement au boccia, ils ont parfois participé pendant leur temps libre comme activité de loisir. Le groupe contrôle (n = 13) ne pratiquait pas le boccia.
Toutes les cohortes ont été suivies pendant une période de 4 mois. Les participants des groupes de compétition de boccia, soit le groupe indépendant et le groupe non indépendant, se sont entraînés 3 fois par semaine pour une durée de 1,5 h à chaque séance. De plus, ces joueurs ont participé à un programme de musculation en groupe 2 fois par semaine. Les participants du groupe récréatif ont suivi une formation sur les tactiques de jeux 2 fois par semaine. Tous les participants de l’étude ont suivi un programme de réadaptation personnalisé. La réadaptation est multidisciplinaire et peut comprendre la physiothérapie, l’ergothérapie, la rééducation de la parole et du langage, la thérapie psychologique et l’exercice thérapeutique. L’objectif du programme de réadaptation est de maintenir ou d’améliorer le niveau fonctionnel.
Pour cette étude, les auteurs ont évalué un total de cinq domaines psychologiques, soit l’état d’humeur, l’anxiété, la qualité de vie, l’estime de soi et les problèmes de santé mentale. Ces domaines psychologiques fournissent des informations sur le bien-être du participant.
Les résultats de la présente étude démontrent que la participation à un programme de réadaptation a un effet positif sur les capacités psychosociales des individus.
En revanche, aucune différence significative entre les groupes n’a été observée dans les scores de changement d’état d’humeur. Ce résultat ne va pas dans le même sens des études déjà présentées dans la littérature effectuée chez des personnes tétraplégiques. Les auteurs suggèrent donc que la gravité du handicap et le type de sport peuvent avoir un impact sur l’effet de l’engagement sportif sur l’état d’humeur général.
Les athlètes engagés dans une activité sportive vigoureuse avaient un niveau d’anxiété plus bas comparé aux autres groupes. De plus, les trois groupes physiquement actifs ont démontré une augmentation significative de la qualité de vie physique. Cependant, le groupe témoin non actif a présenté des changements similaires dans la qualité de vie. Tous les participants, y compris le groupe témoin, étaient impliqués dans une activité physique due à la thérapie visant à améliorer la fonction du patient. Par conséquent, le groupe témoin peut également avoir connu une amélioration de la qualité de vie associée à l’activité physique.
L’évaluation de l’estime de soi a rapporté des résultats étonnants dans cette étude. Alors que le sport a auparavant été signalé comme un médiateur pour l’amélioration de l’estime de soi chez les personnes handicapées en remettant en question leurs limites, ce n’a pas été le cas dans cette étude. Le groupe témoin a démontré une diminution de l’estime de soi, tandis que le groupe compétitif non indépendant a démontré une augmentation de l’estime de soi. Or, les participants du groupe compétitif indépendant indiquaient une diminution de l’estime de soi. Ce résultat pourrait être attribué à la tendance des athlètes à viser le perfectionnisme dans leurs performances, ce qui peut être associé à des réponses négatives telles qu’une diminution de l’estime de soi.
La recherche a montré qu’en adoptant des comportements sains, tels que l’exercice, les personnes handicapées peuvent améliorer le bien-être mental global. En effet, les trois groupes actifs ont présenté des améliorations faibles à modérées de leur bien-être mental.
En conclusion, peu d’études ont examiné l’influence de l’activité physique sur le statut psychosocial des personnes ayant un handicap physique sévère. Les résultats de cette étude indiquent que le programme de réadaptation a eu un effet positif général sur les attributs psychosociaux des participants, quel que soit leur groupe de recherche. La variable dans laquelle le plus grand changement s’est produit dans tous les groupes d’étude était la qualité de vie liée à la santé physique.
Les groupes actifs, en particulier les deux groupes compétitifs ont démontré des changements favorables des facteurs psychosociaux. Cependant, un entraînement rigoureux peut parfois avoir des effets négatifs, tels qu’une augmentation de la dépression et de la confusion et une diminution de la vigueur. Ces effets négatifs peuvent être liés à la fatigue démontrée lors d’une formation rigoureuse des participants. Par conséquent, les entraîneurs et les administrateurs sont encouragés à faire preuve de prudence concernant le volume et l’intensité des lancers lors de la planification de l’entraînement de leurs athlètes.

GUY HAJJ BOUTROS
Étudiant au doctorat à l’université McGill au département de Médecine Expérimentale. Il a complété un bacc. et une maîtrise en Kinésiologie de l’UQAM. Il enseigne comme chargé de cours au dép. des Sciences des l’acitivité physique à Montréal. En apprendre davantage ici.

MARIE-ANNE LANDRY-DUVAL
Étudiante à la maitrise en science de l’activité à l’UQAM, durant son cheminement son intérêt envers la réadaptation et le sport adapté s’est rapidement développé. Elle s’implique aussi dans plusieurs projets de recherche dans le domaine de la physiologie de l’exercice. En apprendre davantage ici.
Références
Barak S, Mendoza-Laiz N, Fuentes MTG, Rubiera M, Huyzler Y. Psychosocial effects of competitive Boccia program in persons with severe chronic disability. J Rehabil Res Dev. 2016;53(6):973-988.
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